La cuisson à juste température

Qu'est-ce que la cuisson à juste température ?

La cuisson à juste température consiste à cuire un aliment de façon à atteindre une température à coeur précise, sans jamais la dépasser, quelle que soit la technique de cuisson utilisée : four chaud, sauteuse, sous vide, barbecue...

Cette méthode permet d'obtenir un appoint de cuisson parfait, et au final, les meilleurs textures et saveurs pour les viandes et les poissons.

La technique la plus commune consiste à cuire un aliment à four chaud jusqu'à atteindre une certaine température. Avec des techniques plus modernes, l'aliment est cuit à basse température, à four doux pendant plusieurs heures, ou sous vide au thermoplongeur ou dans un four vapeur.

Même s'il existe des méthodes empiriques pour estimer la température à coeur d'un aliment, l'utilisation d'une sonde de cuisson est souvent indispensable à l'obtention de bons résultats.

Si le milieu de cuisson est chaud, il faudra prendre en compte l'inertie : la température à coeur continuera à monter de plusieurs degrés une fois sortie. Attention à la surcuisson !

Rien de bien compliqué, il suffit de comprendre comment ça marche. Et vous êtes au bon endroit, on vous explique tout en détail.

La cuisson à juste température
Illustration issue du site www.chezfood.com

Température de cuisson à coeur

Définition

La température de cuisson à coeur d'un aliment est la température exacte qu'il doit atteindre en son centre pour être cuit à l'appoint voulu, du bleu au bien cuit, sans la dépasser. En-dessous il n'est pas assez cuit, au dessus il l'est trop.

Elle est valable quelle que soit la méthode utilisée pour la cuisson : four chaud, four doux, sauteuse, barbecue, liquide bouillant, cuisson sous vide...

La cuisson sera plus ou moins homogène en fonction de la température du milieu de cuisson. Par exemple :

  • Peu homogène à four très chaud : légèrement trop cuit sur les bords.
  • Parfaitement homogène sous vide : appoint exact depuis la surface jusqu'à centre.

Quel est l'intérêt ?

L'utilisation moderne de ces températures a pour but de sublimer le produit en lui apportant la meilleure texture et les meilleures saveurs. Quelques degrés suffisent en effet à modifier complètement la consistance et la jutosité d'une viande ou d'un poisson.

Comment ça marche ?

Lors d'une cuisson, la chaleur ambiante (du four, de l'eau...) se diffuse progressivement de la surface vers le centre de l'aliment. Elle met un certain temps pour y parvenir, c'est ce qu'on appelle le temps de cuisson.

L'aliment va progressivement chauffer à coeur et se transformer. Il passe successivement par différents stades : pas assez cuit, saignant, bien cuit, trop cuit, parfois brûlé...

Températures et types d'aliments

Les températures optimales varient en fonction du type d'aliment. Le boeuf, le veau, le canard et l'agneau ont des températures de cuisson similaires ; mais qui sont très différentes de celles du porc, du poulet ou des volailles, principalement du fait de la texture de leur chair. Le poisson possède aussi ses propres caractéristiques.

Les différents morceaux ne se cuisent pas non plus de la même manière : les viandes tendres cuisent rapidement et se mangent juste cuites, tandis que les morceaux durs doivent être cuits longuement pour devenir fondants. Par exemple, le filet de boeuf se mange saignant, rôti ou sauté ; alors que le jarret de veau doit être braisé et servi bien cuit.

Tableaux des températures de cuisson à coeur

L'article sur les températures à coeur des aliments vous indique les températures de cuisson à coeur pour tous les types de viande (boeuf, veau, porc, agneau, poulet, canard, pigeon, caille...), les poissons, crustacés et mollusques et quelques autres aliments (oeufs, pain...).

Il propose également, à chaque fois que c'est judicieux, les températures pour les différents appoints du bleu au bien cuit.

Comment mesurer la température à coeur ?

A l'ancienne

Il existe deux méthodes empiriques pour sonder la température à coeur des aliments pendant leur cuisson. Leurs avantages sont qu'elles ne nécessitent aucun équipement coûteux et fonctionne même quand on cuit un steak d'iguane au feu de camp lorsqu'on s'est échoué sur une île déserte.

La résistance à l'enfoncement

Ou ressentir comment l'aliment se comporte lorsqu'on appuie dessus.

Il suffit d'appuyer avec le doigt sur la surface de l'aliment et d'estimer sa résistance à l'enfoncement. Cette technique fonctionne essentiellement pour les viandes.

La viande cru est très molle et d'enfonce facilement. Elle a une élasticité relativement faible et garde sa forme enfoncée pendant quelques instants. A contrario la viande cuite durcit, résiste plus à l'enfoncement et gagne en élasticité.

Donc plus une viande est molle moins elle est cuite, et à l'inverse, plus elle est dure, plus elle est cuite. Cette technique, avec un peu d'expérience, s'avère pratique pour estimer l'appoint de cuisson des petites pièces de viandes à sauter, mais pour d'autres aliments ou pour des grosses pièces, c'est une autre paire de manche.

Quoi qu'il en soit, ce n'est pas évident de sonder à coeur avec précision de cette façon !

L'aiguille piquée à coeur

Cette méthode consiste à piquer une aiguille assez fine jusqu'au coeur de l'aliment en cuisson, la laisser quelques instants, la ressortir et la déposer immédiatement contre sa lèvre inférieure. On perçoit assez facilement si l'aiguille est froide, tiède, chaude ou brûlante.

C'est plus précis que la première méthode et ça marche pour tous les aliments, y compris les grosses pièces ; on progresse ! Les cuisiniers « roots » se reconnaissent à cette pratique, et au bouchon de liège qui sert de manche à leur aiguille. Il n'y a pas à dire, ça fonctionne. On repassera quand même au niveau de la précision.

A la sonde

Qu'est-ce que c'est ?

Une sonde (ou thermosonde) est un thermomètre électronique muni d'une aiguille, le plus souvent au bout d'un fil pour pouvoir l'utiliser dans un four. Il existe aussi des sondes stylo pour des mesures instantanées.

On pique l'aiguille à travers l'aliment en prenant soin que la pointe atteigne le centre. La température est mesurée et s'affiche sur un écran LCD au bout de quelques secondes. Facile et efficace.

Pourquoi utiliser une sonde ?

Les anciennes techniques nécessitent toutes de l'expérience pour être fiables. Et même pour un cuisinier chevronné, une alarme sonore est toujours bien plus confortable et offre une bien meilleure précision.

C'est aujourd'hui la meilleure solution. Si vous n'en possédez pas, je ne peux que vous conseiller d'en acheter une.

Quelles sondes acheter ?

Pour une utilisation domestique, on trouve désormais des modèles de sonde à un coût raisonnable voire modique.

La sonde Mastrad Classic est celle que j'utilise à la maison depuis des années, et au restaurant depuis que j'ai cassé l'aiguille hors de prix de ma Thermoworks...

Elle en a vu de toutes les couleurs : four, barbecue, sauteuse, de la graisse comme s'il en pleuvait, elle est tombée dans l'eau, etc... et elle marche encore très bien. Son seul défaut est le diamètre de l'aiguille : un peu grosse, elle laisse un trou franchement visible dans la viande. Elle est solide et fait le boulot.

La sonde de cuisson Habor double aiguilles est un modèle d'entrée de gamme parfaitement fonctionnelle. Elle permet de démarrer la cuisson à juste température pour moins cher qu'un rôti !

Pour des mesures instantanées, la sonde ETI Thermapen 4 a acquis une réputation internationale, on la voit sur les vidéos des «pitmasters» du monde entier (experts du BBQ). Elle a un temps de réaction très rapide, l'affichage de la température est quasiment immédiat. Vraiment très pratique pour des mesures à l'entrée du four ou en sauteuse, et absolument parfaite pour le barbecue.

Les modèles plus professionnels, comme ceux de Thermoworks ou Dortsmann par exemple, sont parfaitement équipés mais coûtent plus cher voir très cher pour le haut de gamme. Ces modèles pro offrent des performances en conséquence au niveau de la précision, de la rapidité d'affichage et sont équipés d'aiguilles ultrafines pour pénétrer facilement sans laisser de marque.

Comment utiliser une sonde ?

Il faut être très vigilant à la manière dont on enfonce l'aiguille, la facilité aura parfois tendance à faire oublier la rigueur. On prend donc le temps de faire attention à 3 points clés :

  • Choisir judicieusement le point de pénétration de l'aiguille, c'est à dire sur une partie charnue et pleine de l'aliment, pas entre deux muscles, ni dans une veine de graisse ;
  • Estimer correctement la trajectoire de l'aiguille pour atteindre le coeur de l'aliment, c'est à dire bien en direction du centre, là où la chaleur mettra le plus de temps à parvenir ;
  • Estimer correctement la longueur sur laquelle on enfonce l'aiguille, c'est sa pointe qui doit atteindre le centre, on veille donc à n'enfoncer ni trop (on dépasse le centre), ni trop peu (on ne l'atteint pas).

A noter également que les os ont une diffusivité thermique (oulala !) plus faible que la chair. En clair, ils prennent moins vite la chaleur, et isole la viande qui se trouve entre eux et le coeur de l'aliment. Dans le cas d'une cuisson d'un carré, d'un gigot ou de toute pièce avec des os, on viendra prendre la température contre l'os qui se trouve le plus au centre. Ce point est à relativiser en fonction du placement de l'os sur la pièce et de l'épaisseur de la chair. Ne pas hésiter à prendre une mesure contre l'os et une mesure bien à coeur pour voir où la cuisson en est à ces deux endroits.

L'inertie thermique

Définition

L'inertie, c'est l'augmentation de la température à coeur que va subir un aliment après avoir été retiré de son milieu de cuisson : four, sauteuse, barbecue, eau de cuisson...

Plus l'environnement de cuisson est chaud, plus cet écart sera important.

La durée de ce phénomène et son intensité (le nombre de degrés supplémentaires que va prendre l'aliment à coeur) dépendent de l'épaisseur de la viande ou du poisson, et de la température de l'environnement de cuisson.

Dans le cas d'une cuisson à four chaud, par exemple à 180°C, l'extérieur de l'aliment est fortement chauffé, et affiche une température bien plus élevée que celle indiquée par la sonde qui est piquée à coeur.

La chaleur doit pénétrer à l'intérieur de la chair et met du temps à en atteindre le centre. Lorsqu'on arrête la cuisson, la quantité de chaleur emmagasinée dans la partie extérieure va se disperser, y compris vers l'intérieur de la pièce, jusqu'à s'équilibrer. C'est l'inertie thermique.

L'inertie dépend du volume de l'aliment à cuire, de sa composition et de la température ambiante de cuisson. Plus la pièce est grosse et plus l'ambiance de cuisson est chaude, plus cette inertie sera importante.

L'inertie lors d'une cuisson à haute température

Lorsque la température du milieu de cuisson est plus élevée que celle à laquelle on souhaite cuire l'aliment, l'inertie devient importante.

C'est le cas dans un four chaud, à la sauteuse ou au barbecue ; et dans une moindre mesure, lors d'une cuisson sous vide où le bain marie est réglé à une température plus chaude que celle que l'on souhaite atteindre à coeur.

AvantagesInconvénients
  • La rapidité : le temps de cuisson est largement réduit. Comptez de 15 à 30 min pour un rôti de boeuf cuit dans un four à 200°C.
  • L'inertie importante : l'aliment continue à cuire plus ou moins longtemps après avoir été sorti. Il risque de trop cuire. Cette inertie est difficile à maîtriser.
  • Cuisson non homogène : si l'inertie est gérée, le coeur de l'aliment est cuit à l'appoint souhaité, mais le bord est obligatoirement trop cuit. On obtient un dégradé du très cuit près de la surface, jusqu'à l'appoint à coeur.

Prenons l'exemple d'une viande cuite au four à 200°C, pour laquelle on souhaite atteindre 55°C à coeur.

La chaleur intense fait monter rapidement la température en surface, et se diffuse peu à peu vers le centre. Avant que le coeur n'ait atteint les 55°C, le bord de la viande va accumuler beaucoup de chaleur. Une fois sorti du four, elle va continuer à se diffuser et cuire le rôti pendant 15 à 20 min.

Il faut sortir la pièce bien avant que la sonde n'indique la température cible. Dans notre exemple, sortir le rosbeef quand la sonde affiche 45°C. Le temps de repos fera le reste et le coeur atteindra 55°C au bout du compte. Et voilà une cuisson réussie !

Si vous sortiez le rôti à 55°C, l'inertie agirait de la même manière et vous auriez une viande à 65°C à coeur en fin de repos. Dommage...

Pour une illustration par un cas concret, voir l'article sur les températures et temps de cuisson d'un rôti de boeuf au four.

L'inertie lors d'une cuisson à four sec à faible température

Une grosse pièce de viande peut également être cuite à four doux, autour des 120°C, pour limiter l'inertie et maintenir une viande très tendre. Dans ce cas, l'écart entre la température mesurée et celle en fin de repos ne sera que de l'ordre de 2°C.

Certaines personnes suggèrent des cuissons à four sec à 70°C, je ne peux que vous le déconseiller à domicile, les risques microbiologiques sont trop importants. La viande reste à des températures dangereuses pendant un temps suffisamment long pour permettre aux bactéries de se développer.

AvantagesInconvénients
  • Pas besoin d'équipement spécifique : la cuisson se fait dans un four domestique classique.
  • L'inertie est faible : l'aliment continue à cuire très peu de temps après avoir été sorti.
  • Cuisson homogène : le coeur et la surface de l'aliment sont cuit de façon relativement homogène.
  • Temps de cuisson long : la chaleur met longtemps pour atteindre le coeur de l'aliment. Comptez plus de 3 ou 4 h pour un rôti de boeuf cuit à 55°C à coeur.
  • Risque micro-biologique : la viande se situe potentiellement dans une gamme de température relativement dangereuse. Elle doit être saisie en sauteuse au préalable pour éliminer les bactéries de surface et la colorer.

L'inertie lors d'une cuisson sous vide à basse-température

Dans le cas d'une cuisson sous-vide à basse température, l'inertie est nulle. Le thermoplongeur ou le four vapeur est réglé à la température que l'on souhaite atteindre à coeur. La chaleur stabilisée se répartie dans tout l'aliment, des bords jusqu'au coeur, de façon parfaitement homogène.

A noter également que l'aliment sous-vide est immergé dans de l'eau (thermoplongeur) ou dans un air saturé en vapeur d'eau (four mixte professionnel). Cette eau a la propriété remarquable d'être un excellent conducteur thermique, bien meilleur que l'air qui au contraire est un isolant.

L'inconvénient de cet excellent équilibre thermique à basse température est la durée de cuisson, beaucoup plus longue que pour une cuisson à four sec.

L'avantage majeur est bien sûr une cuisson à coeur parfaite. Il est impossible de surcuire un aliment qu'on aurait laissé trop longtemps, a contrario d'une cuisson à four chaud où quelques minutes suffisent à ruiner une cuisson.

AvantagesInconvénients
  • Aucune inertie : l'aliment est cuit au degré près, sa température à coeur ne peut que baisser en fin de cuisson.
  • Cuisson homogène : le coeur et la surface de l'aliment sont cuit de façon parfaitement homogène.
  • Faible risque micro-biologique : l'aliment est protégé de l'environnement par le sac sous vide. Une cuisson longue permet même de le pasteuriser. Attention toutefois à travailler des produits sains à la base, et éviter les cuissons courtes ou les mi-cuits (~ 40°C) pour les personnes fragiles.
  • Nécessite un équipement spécifique : un thermoplongeur ou un four vapeur précis au degré près sont indispensables.
  • Temps de cuisson très long : la chaleur met longtemps pour atteindre le coeur de l'aliment. Comptez plus de 5 h pour un rôti de boeuf cuit sous vide à 55°C à coeur.

Méthodes de cuisson

On fonction de votre équipement, ou tout simplement de vos envies, vous pouvez décider d'une cuisson traditionnelle au four, en sauteuse ou en cocotte ; ou opter pour une cuisson sous vide à basse température ; ou encore cuire au barbecue.

Ces techniques sont étudiées en détails dans leur chapitre respectif.


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